Divertir, Découvrir, Enrichir
WebOuest Débat écologique: Vraie ou fausse fourrure?
Source: madmoizelle.com

Débat écologique: Vraie ou fausse fourrure?

revert
Par Joëlle Preston | 20 février 2023

Lors de Paris Haute Couture Week, la maison de mode italienne Schiaparelli a présenté trois vêtements particulièrement controversés: une robe de fourrure ornée d’une tête de léopard, une robe noir avec une tête de lion, et un manteau de fourrure avec tête de louve. Comme vous l’avez deviné, un peu comme l’évènement de la tenue y2k de Katie Holmes, les opinions sur ces vêtements sont mixtes. D’un côté, plusieurs croient que ces pièces font la promotion non seulement de la fourrure, mais aussi du « trophy hunting », tel que valorisé dans les safaris. Pour d’autres, ces vêtements incarnent l’esprit de la Haute Couture, et rendent surtout hommage aux origines de la marque et à sa fondatrice. Mais ce qu’il faut comprendre avant tout, c’est que les trois vêtements sont complètement faux, fabriqués de mousse, résine, et de fausse fourrure.

WebOuest
Photo de Elsa Schiaparelli portant une de ses créations, un chapeaux léopard, durant les années 1930. Source: https://www.historyofleopardprint.com/post/schiaparelli-and-the-leopard

Si vous avez de la difficulté à le croire, je suis d’accord. La première fois que je les ai vus, j’étais certaine qu’ils s’agissaient de vrais animaux. Personnellement, je suis émerveillée par ces créations, et mon opinion des pièces est plutôt favorable. Je ne trouve pas du tout que ces pièces encouragent le trophy hunting, mais plutôt démontre une alternative concrète: ces sculptures indéniablement exécutées à la perfection prouvent que si l’on désire une tête de lion, on n’a pas besoin d’en chasser! Pour la valorisation des safaris, je trouve que ça sort la collection de son contexte: ces pièces rendent hommage aux créations de la fondatrice de Schiaparelli qui était une enthousiaste des peaux exotiques, et surtout, les trois animaux sont une représentation des bêtes que l’on trouve dans Inferno, la première partie du poème Divine Comédie de Dante, une des inspirations pour la collection.

WebOuest
Image représentant Inferno par Dante, notamment Dante avec le lion, le léopard, et la louve. Source: https://beyondforeignness.org/8429

Question fourrure par contre, pour des raisons environnementales, je dois avouer que je suis plutôt du camp de la vraie fourrure, mais avec une condition. Laissez-moi vous expliquer…

Les fausses fourrures sont, de façon générale, composées de polyester, un mot qui veut simplement dire plastique – et qui dit plastique, dit pétrole. Les vêtements en fausse fourrure contribuent donc à l’extraction du pétrole et à la dépendance à cette ressource, et nuit aux animaux, à leur écosystème et à l’environnement beaucoup plus que l’on ne croit. De plus, il y a la lessive: si vous mettez votre fausse fourrure dans la lessiveuse, des micro-fibres de plastique se détachent du vêtement et contaminent l’eau. 

Les vraies fourrures par contre sont une fibre naturelle. Du point de vue de la fin de vie d’un vêtement, une peau naturelle se décomposera, alors qu’une fausse fourrure non. Cela étant dit, je tiens à souligner que je suis d’accord que l’exploitation des animaux uniquement pour récupérer les fourrures est insensée, et je n’appuie pas les fermes de fourrures (qui sont extrêmement néfastes). Malheureusement, la majorité des fourrures aujourd’hui viennent de ferme de fourrures.

WebOuest
L’extérieur d’une ferme de fourrures. Source: https://tonpetitlook.com/2015/03/05/les-fermes-de-fourrure-et-leur-impact-environnemental-le-mythe-de-la-fourrure-verte/

Ce qu’il faut viser, c’est un système circulaire, ce qui se manifeste de plusieurs façons. Premièrement, et avant tout, des achats de fourrure de seconde-main devraient être priorisés. Vraie ou fausse, en termes de circularité, elles s’équivalent car elles existent déjà et partagent le même destin si elles ne sont pas achetées: la décharge. Rien ne se compare au vintage et au seconde-main quand ça vient à la durabilité.

Du point de vue d’une nouvelle production, la vraie fourrure serait la plus écologique (à mon avis) seulement avec un système de production harmonieux. Dans un monde parfait, un équilibre et une symbiose seraient établis: une bête est tuée pour être utilisée dans son entièreté, pas seulement pour récupérer sa fourrure ou sa viande, de façon à maximiser les ressources existantes avant d’accéder aux ressources vierges. Bien sûr, ceci s’applique aux fausses fourrures aussi – si un système de recyclage de polyester est établi, on diminue son impact écologique.

WebOuest
Bottines Schiaparelli des années 1930, ornées de fourrures de singe. Source: https://www.collectorsweekly.com/articles/a-shock-of-schiaparelli/

Après ça, c’est vrai que c’est une question d’éthique personnelle. Les deux ont chacun leurs désavantages. Ma conclusion personnelle est que les vraies fourrures de seconde-main et vintage sont les plus écologiques à porter, et je comprends que cela puisse être controversé. J’oserais même dire que la solution ultime, serait aucune production vierge, fausse ou vraie. La fabrication des deux types de fourrure ont de sérieux impacts écologiques. Entre polluer en faisant l’extraction du pétrole ou maltraiter des animaux, on ne peut pas dire que l’un est mieux que l’autre. 

Dans l’esprit de l’écologie, je dirais toujours que ce qui existe déjà et ce qui est naturel devrait être favorisé – et si vous êtes contre les vraies fourrures vintage, je vous donne le défi de repenser à votre opinion avant d’appuyer la production de peaux et fourrures véganes. N’est t-il pas mieux d’honorer une bête décédée il y a 50 ans en préservant sa peau? Il me semble que c’est un gaspillage encore plus grand de s’en débarrasser pour favoriser le nouveau et le faux – surtout quand la production de la fausse fourrure pollue et endommage l’environnement dans l’immédiat.

 

La francophonie du Nord et de l’Ouest habite sur des territoires visés par de multiples traités avec les peuples autochtones ainsi que des territoires non cédés. Ces peuples ont accueilli les premiers francophones et les ont aidés à survivre et prospérer. C'est dans le respect des liens avec le passé, le présent et l'avenir que nous reconnaissons la relation continue entre les peuples autochtones et les autres membres de la communauté francophone. Au-delà de cette reconnaissance, WebOuest s’engage à mettre en lumière des histoires des peuples autochtones qui habitent toujours ces terres.