
Depuis quelques décennies déjà, on vit comme société la virtualisation de tout. La mode par contre, a une valeur intégrale à sa forme physique qui ne peut pas être satisfaite virtuellement: un vêtement dans le virtuel ne peut pas habiller une personne physiquement. Donc, à quoi peut servir la mode IA si ce n’est pas pour nous vêtir? Personnellement, j’imagine surtout des applications qui pourraient servir à réduire la quantité de vêtements sur terre, ainsi que des systèmes de production plus éco-responsable.
Premièrement, qu’est-ce que l’IA? Il n’y a pas de définition universelle, mais d’après ce que je comprends, c’est l’utilisation et le regroupement de plusieurs données pour résoudre des problèmes complexes, avec le but ultime de créer un algorithme capable d’imiter des capacités cognitives humaines: « …la machine va rechercher les liens entre des données préalablement sélectionnées pour un domaine spécifique (par exemple, sur 10 années, dans différentes villes, le nombre de crèmes glacées vendues et la température de l’air) et les catégoriser. Ce modèle pourra ensuite être utilisé pour résoudre des questions du type : s’il fait 25°, combien de glaces puis-je espérer vendre dans tel lieu ? » En terme de mode, une équation similaire pourrait donc servir à prévoir une quantité exacte de production requise d’un vêtement donné, basé sur les ventes actuels de vêtements similaires, ce qui rendrait la production plus lean tout en bénéficiant des avantages financiers de le produire en grande quantité plutôt qu’à l’unité. Une autre application pourrait servir à déterminer quels éléments ou styles de vêtements devraient être mis en production, en se basant sur les vêtements bestsellers des saisons précédentes. Ceci démontre donc les deux formes d’IA: une basée sur la génération de résultats en utilisant des règles et modèles, et l’autre pour déchiffrer les règles et modèles basées sur des résultats.
Alors que l’avantage de l’IA réside dans sa capacité de traiter d’énormes quantités de données, l’IA n’est pas possible sans l’intervention humaine: c’est un humain qui programme l’algorithme en sélectionnant les données d’apprentissage qui alimentent l’intelligence. Pour la Ai Fashion week, par exemple, les collections de vêtements ont été générées en utilisant une base de données spécifiques choisie par le designer (ceci veut donc dire, dans ce cas-ci, qu’un designer de mode n’est pas nécessairement un expert couturier, mais un expert de données!) Très concrètement, ceci peut pousser les limites de la mode tout en réduisant l’empreinte écologique. Par exemple, la programmation de données tel que le comportement de certains tissus couplés avec des styles et formes excentriques permet de concevoir des vêtements que les humains ne penseraient même pas possible de créer, sans gaspillage. Au lieu d’expérimenter avec des tissus, découper des patrons, et retravailler un vêtement, l’IA permet de tout modifier virtuellement, sans perte de tissus, avec moins de main-d’œuvre et de ressources. De plus, AI Fashion week réalisera seulement la collection du gagnant, ce qui évite la surproduction de vêtements – une pratique beaucoup plus éco-responsable que d’autres compétitions.
Étant donné sa fonction de résoudre des problèmes complexes, je vois un certain potentiel de transformer la mode vers des pratiques durables. Bien sûr, la mode IA pourrait perturber plusieurs métiers, surtout pour les séances de photos et les défilés de mode (mannequins, production, mises en scène, photographe, etc.), mais peut être qu’un juste milieu peut être trouvé. Surtout dans notre ère de tendances infatigables, faut-il vraiment créer tous les vêtements conçus? Est-ce que les grandes marques peuvent trouver un système hybride, ou seulement un défilé sur deux est en personne? Vu les effets néfastes de la mode, la mode peut-elle être appréciée comme de l’art virtuel sans empreintes écologiques, au moins en partie? À voir dans les années à venir…