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WebOuest Un message du dernier soldat de la Première Guerre mondiale

Un message du dernier soldat de la Première Guerre mondiale

L'art de la photographie: la lumière est notre pinceau
Par Dominique Liboiron | 11 novembre 2023

 

 

« La guerre résout très peu. » Ces mots nous viennent de John Babcock, le dernier soldat canadien de la Première Guerre mondiale. M. Babcock m’a accordé deux entrevues, la dernière alors qu’il avait 108 ans. Selon lui, les gouvernements peuvent régler leurs différends par l’entremise d’une communication ouverte et en ayant davantage de patience dans les processus diplomatiques.

Né le 23 juillet 1900 à Holleford en Ontario, M. Babcock a passé les dernières années de sa vie à Spokane, dans l’État de Washington, avec Dorothy, son épouse depuis plus de 30 ans. Il marchait avec l’aide d’une canne, il avait la mémoire vive et portait deux prothèses auditives. Malgré son âge, il gardait la voix forte et grave d’une personne franche et honnête. Je pense à nos conversations aujourd’hui car le 11 novembre marque le 105e anniversaire de l’Armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale.

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Né en 1900, John Babcock était le dernier ancien combattant canadien de la Première Guerre mondiale. Témoin de plus d’un siècle d’histoire, M. Babcock pensait que les nations passent trop rapidement aux armes. Selon lui, « La guerre résout très peu. » Photo: Dorothy Babcock

M. Babcock n’avait que 14 ans quand son père est décédé. Par la suite, sa mère s’est trouvée un emploi comme domestique en Saskatchewan, mais ses frères et sœurs ont été éparpillés parmi la parenté. 

La vie militaire offrait un salaire raisonnable pour l’époque, ce qui a encouragé M. Babcock, mais il s’est joint à l’armée canadienne surtout par un sentiment de devoir. « C’était la chose à faire, » a-t-il dit franchement.

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De nos jours, la propagande qui endosse la guerre nous arrive surtout de la télévision, des journaux et de l’internet. À l’époque de la Première Guerre mondiale, les autorités se fiaient à des affiches comme celle-ci. Elle porte l’influence de la fameuse image de l’Oncle Sam qui dit, « I want you. » Photo: Dominique Liboiron

En dépit de son jeune âge, M. Babcock s’est inscrit. Il n’avait que 15 ans et demi. Il a tout simplement menti et a pu déjouer les autorités militaires avant que son commandant ne reçoive une lettre de la Saskatchewan dans laquelle Mme Babcock a dévoilé le vrai âge de son fils. 

« Mon commandant est venu me dire, “Je comprends que tu vas nous quitter,» et j’ai demandé pourquoi, » l’ancien combattant m’a-t-il expliqué. « C’est là qu’il m’a dit, «Nous avons reçu une lettre de ta mère,» et j’ai répondu qu’elle ne me disait pas quoi faire. »

John Babcock est resté dans l’armée, mais les autorités lui ont assigné un travail manuel dans des baraques à Halifax. Sachant que l’information se propage lentement dans les bureaucraties, il s’est inscrit de nouveau avec un autre régiment. Cette fois, on l’a envoyé en Angleterre où, encore une fois, on a appris qu’il était adolescent. 

M. Babcock n’a pas été puni. Au lieu, il a été placé dans un bataillon avec 1300 gars qui attendaient avoir 19 ans, l’âge minimum pour les soldats canadiens, M. Babcock a subi un entraînement rigoureux, mais n’a pas combattu – la guerre s’est terminée quand il avait 18 ans. Source de chagrin et de regret, le fait qu’il n’ait pas vu le combat l’a attristé pendant de nombreuses années. Mais, avec le temps, sa perspective a changé. « C’est peut-être une bonne chose que je ne me sois pas battu, » a-t-il dit. « Je me serais probablement fait tuer. »

Bien qu’il n’ait pas connu le combat actif, le centenaire a vu au sein de sa famille les ravages de la Première Guerre mondiale. Son frère Manley a fait une crise nerveuse après son expérience au front. Les ressources thérapeutiques et même le terme pour désigner ce qui s’appelle de nos jours le trouble de stress post-traumatique n’existaient pas au début du 20e siècle. 

Doté d’une mémoire hors pair et d’une forte intelligence, Manley a étudié à l’Université McGill et s’est tourné vers la religion pour se réconcilier avec son passé difficile. Plus tard, il est devenu évêque de l’Église protestante du Nazaréen.

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Ces champs de bataille de la Guerre 14-18 sont mieux connus que les champs de bataille de la guerre de Corée, de l’Afghanistan ou que les noms des missions humanitaires. Néanmoins, le Jour du souvenir honore tous les soldats peu importe où ils ont servi. Photo: Dominique Liboiron

Même après les difficultés marquées des chefs politiques et des dirigeants militaires à résoudre le conflit qui a duré de 1914 à 1918 et qui a coûté plus de 20 millions de vies, M. Babcock n’a pas perdu espoir dans la classe gouvernante. Selon Dorothy, cet optimisme expliquerait aussi la longévité de son mari qui ne s’inquiétait pas des tournants que lui présentait la vie. 

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La Première Guerre mondiale marque un point tournant dans l’histoire de notre pays. Le Canada n’avait pas le choix de participer au premier conflit mondial parce qu’à l’époque l’Angleterre décidait de nos affaires étrangères. Grâce à son rôle durant le conflit, le Canada a obtenu plus d’indépendance de l’Angleterre après l’Armistice et a pu ensuite décider de participer ou non à de futures guerres. Photo: Dominique Liboiron

Après la guerre, M. Babcock a immigré aux Etats-Unis afin de recevoir une formation d’électricien. Il s’est marié, a fondé une famille et a géré sa propre entreprise comme entrepreneur mécanique jusqu’à l’âge de 89 ans. Ensuite, il est retourné à l’école; la mort de son père l’ayant obligé à cesser ses études à un jeune âge. C’est à l’âge de 95 ans que M. Babcock a complété son école secondaire avec une moyenne de 90,5 %. 

Lors de notre dernière conversation, les guerres faisaient encore des ravages en Irak et en Afghanistan. M. Babcock constatait que les techniques militaires avaient évolué depuis son temps quoique leur but demeure pareil, « Il existe de meilleures façons de tuer les gens sans se faire tuer soi-même, » a-t-il dit. En plus, il ne pensait pas que le conflit armé règlerait le problème ni en Irak, ni en Afghanistan. Nous savons maintenant qu’il avait pleinement raison. 

Le gouvernement de Stephen Harper lui avait offert des funérailles d’État, mais il a renoncé par respect aux soldats qui sont morts sans cet honneur. « Oh, ils peuvent avoir des funérailles d’État s’ils veulent, mais pas pour moi, pour d’autres, » a indiqué M. Babcock. À la place, il a demandé une cérémonie en mémoire de tous les anciens combattants, surtout ceux qui ont connu les tranchées.  

Et qu’aurait-il dit des conflits en Ukraine et à Gaza? Le dernier ancien combattant canadien de la Première Guerre mondiale aurait probablement dit que les pays doivent mieux dialoguer pour éviter les conflits armés. 

M. Babcock est décédé le 18 février, 2010 à la suite d’une pneumonie. Il avait 109 ans.

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Trouvez-vous que votre coquelicot tombe trop facilement? Essayez ce petit truc pour qu’il reste en place. Passez l’épinglette à travers votre coquelicot et il ne s’enlèvera plus. Le rapport entre le coquelicot et le Jour du souvenir remonte à la Première Guerre mondiale. « Au champ d’honneur, » le poème célèbre du lieutenant-colonel canadien John McCrae, a beaucoup mis en valeur le port du coquelicot dans les pays du Commonwealth. La première strophe du poème se lit comme suit: « Au champ d’honneur, les coquelicots sont parsemés de lot en lot. » Photo: Dominique Liboiron
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