Avertissement: des images dans cet article pourraient choquer certaines personnes.
Sans aucun doute, les appareils photo numériques ont remplacé les appareils à pellicule. Mais le film n’est pas mort. En réalité, les caméras instantanées de Polaroid et le Fujifilm Instax jouissent d’une renaissance tandis que les appareils photo à usage unique connaissent une montée en popularité auprès des adolescents et des jeunes adultes qui veulent expérimenter avec la technologie analogique. Le film 35mm, loin de disparaître, attire de plus en plus d’amateurs de photo et le prix de l’équipement usagé monte en raison de la demande.
Malgré cet intérêt pour la photographie classique, beaucoup de gens croient que le numérique a remplacé le film en raison d’une meilleure qualité d’image. Mais non. Au niveau de la beauté et au niveau de la qualité, les photos sur film sont toutes aussi belles et toutes aussi bonnes. Plusieurs d’entre elles ont marqué l’histoire et nous restent encore dans la mémoire.
Vous n’avez qu’à penser à la multitude d’entre elles publiées dans National Geographic au cours du 19e et du 20e siècle.
En plus des images dans la revue au cadre jaune, le photographe canadien Yousuf Karsh a pris une photo de Winston Churchill qui compte parmi les images les plus vues du 20e siècle.
La Guerre du Viêt Nam et la Grande Dépression sont également sources de nombreuses photos emblématiques.
Si les vieilles caméras prennent des photos frappantes, distinguées et qui évoquent des émotions fortes, pourquoi ont-elles été remplacées par des caméras numériques? Des raisons techniques et psychologiques nous fournissent les réponses.
D’abord, les caméras numériques possèdent un grand avantage. À vrai dire, elles en possèdent plusieurs, mais selon moi il n’y qu’un seul qui dépasse incontestablement les autres: elles nous permettent de vérifier tout de suite si une photo est réussie ou non. Grâce à la photographie numérique, il n’y a plus d’incertitude.
La capacité de scruter une photo nous permet ensuite de changer les paramètres de la caméra et de voir l’effet des changements sur une photo. C’est-à-dire que nous pouvons modifier l’angle, le zoom, la quantité de lumière ainsi que d’autres aspects afin d’obtenir le résultat voulu. En voyant l’effet des paramètres, nous comprenons mieux la photographie et nous nous améliorons en tant que photographe. Ce processus est plus lent, plus dispendieux et plus encombrant avec la photographie classique.
De plus, les caméras numériques nous permettent de changer la sensibilité à la lumière d’une image à une autre. Vous pouvez poser une photo au soleil avec une sensibilité ISO de 100 et tout de suite passer à une pièce sombre où vous n’avez qu’à appuyer un bouton pour régler l’ISO à 25 600. Vous n’avez donc pas à changer la pellicule pour modifier l’ISO.
Côté désavantage, une nouvelle caméra numérique et les lentilles coûtent chères. Par contre, les modèles usagés sont plus abordables. Peu importe si un photographe se sert du modèle le plus récent, d’un appareil de seconde main ou de son téléphone, il ne paye rien pour prendre une photo numérique. Quant à la photographie argentique, ainsi nommée car une pellicule contient des cristaux d’argent qui réagissent à la lumière, beaucoup de photographes reçoivent gratuitement des caméras à film de gens qui veulent s’en débarrasser. Le coût initial se trouve donc souvent à zéro, mais les photographes se ramassent avec un coût continu au niveau du film, du développement et de l’impression. Chaque photo argentique coûte de l’argent.
Je vous donne un exemple. Lors de ma dernière chronique, je disais que j’ai vécu au Japon pendant trois ans. Durant ce temps, j’estime avoir pris plus de 10 000 photos numériques et j’en ai gardé près de 7 500. Le tout occupe trois cartes mémoire qui m’ont coûté un peu moins de 40 $. Si j’avais eu à acheter du film, le développer et l’imprimer, ces mêmes 10 000 photos m’auraient coûté environ 10 000 $!
Le chiffre 10 000 est important parce qu’il revient dans une citation du célèbre photographe français Henri Cartier-Bresson, ce pionnier de la photographie de rue. Selon lui, nos 10 000 premières photos sont les pires. Autrement dit, nous devons prendre 10 000 photos lors de notre apprentissage. En principe, une fois que nous avons acheté l’équipement numérique, il n’y pas de dépenses. Nous pouvons nous entraîner beaucoup et devenir un excellent photographe sans que cela nous coûte les yeux de la tête.
Les autres avantages de la photographie numérique sont moins importants alors passons à la dimension psychologique pour expliquer pourquoi elle est devenue plus populaire que la photographie classique. D’abord, beaucoup de gens sont portés à croire que les appareils numériques sont meilleurs tout simplement parce qu’ils sont nouveaux. D’autres comprennent les avantages de la technologie de pointe. Ensuite, constatons que lorsqu’un produit est nouveau les gens qui l’achètent en premier exercent un certain pouvoir social. Les premiers sont à la mode et peuvent s’en vanter tandis que les derniers se sentent dépassés et peut-être même démunis, ce qu’ils n’aiment pas, alors ils s’achètent une nouvelle caméra.
L’appui des publicités donne de l’élan au désir de posséder la technologie la plus récente et de combler le désir du statut social que cette technologie leur accorde. Il faut une certaine force de caractère pour résister cette pression sociale ou de ne pas vouloir se sentir « cool ».
En considérant les atouts de la photographie électronique, il se peut que vous vous demandiez pourquoi le film n’est pas mort. Pour la même raison que les disques vinyles ne sont pas morts. Au niveau technique, leur son n’est pas aussi clair qu’un disque compact ou un fichier audio, mais le vinyle possède un son chaud et accueillant comme une chaise berçante devant un foyer. Son côté intangible et nostalgique, mais difficile à définir, nous attire toujours. Revenons à la photographie sur film qui possède à son tour une certaine aura. Quel est ce je ne sais quoi?
Cet élément mystérieux s’explique par de multiples raisons. Le film éveille nos émotions plus que le numérique parce que les couleurs sont chaudes et les photos ont une texture qu’on a l’impression de ressentir. De plus, le film évoque le passé et entraîne donc de la nostalgie. Toutefois, c’est peut-être mieux de ne pas trop expliquer ni comprendre le film pour ne pas lui enlever sa magie.
Au niveau de ses avantages, comme je disais nous y voyons des couleurs vives qui donnent une lueur. Les couleurs sont plus jolies qu’en vrai vie. C’est le grand avantage du film. Quant aux photos numériques, elles produisent parfois des images un peu robotique. La lumière semble stérile ou morte. Elle peut être trop blanche.
Le film capte beaucoup de détails et de texture, plus que le numérique, quoique ce dernier commence à se rattraper. Au niveau du film noir et blanc, il révèle une plus grande variété de tons.
Les limites de la photographie peuvent être des avantages ou des désavantages selon votre point de vue. Étant donné que vous devez payer par chaque image et qu’il n’y a que 24 ou 36 photos par rouleau, vous êtes quelque peu obligé de réfléchir et de prendre le temps de bien composer une photo. Tout comme certains aiment un disque vinyle qui griche, certains aiment le grain d’une image en noir et blanc alors que d’autre s’en passent.
Pour résumer, nous pouvons facilement ajuster la sensibilité ISO et nous n’avons pas à payer pour chaque photo. Plus important, un appareil numérique nous indique sans délai si une photo est bien captée ou pas. En plus de la certitude que cela nous accorde, nous pouvons reprendre une photo plusieurs fois afin d’obtenir le résultat voulu. Donc, le numérique nous permet de devenir un photographe plus compétent en moins de temps.
Malgré sa technologie de pointe et des facteurs psychologiques, le numérique ne dépasse pas le film au niveau de la qualité des images et il n’a pas le charisme du film. Quant à lui, le film offre des couleurs splendides, beaucoup de détails et des images en noir et blanc plus dynamiques, si vous avez la patience pour l’utiliser.
Chaque type de photographie possède des forces et des faiblesses. À vous de déterminer ce qui vous convient.
Ci-dessous, vous trouverez 10 photos que j’ai prises. Dites-moi lesquelles sont numériques et lesquelles sont sur film. Envoyez vos réponses à dliboiron4@hotmail.com avant le 31 décembre. À gagner: un t-shirt de WebOuest et un bon d’achat de 50 $ chez London Drugs.
Les employés de WebOuest ou de London Drugs et leur parenté ne peuvent participer. Il n’y a qu’une seule participation par personne. Le gagnant sera annoncé dans ma chronique du mois de janvier.
Pour savoir comment distinguer une photo numérique d’une photo argentique, visitez mon compte Instagram à www.instagram.com/liboirondominique/.
Je tiens à remercier Chris Mabie, le gérant de London Drugs à Lethbridge, de nous avoir offert un bon d’achat pour ce concours.
Envoyez vos réponses à dliboiron4@hotmail.com avant le 31 décembre. Les employés de WebOuest ou de London Drugs et leur parenté ne peuvent participer. Il n’y a qu’une seule participation par personne. Le gagnant sera annoncé dans ma chronique du mois de janvier.
Ces photos ne figurent pas dans le concours. Elles y sont tout simplement pour partager avec vous, chers lecteurs.
Lors de l’enterrement de sa belle-mère en mai 2022, Renald Liboiron de Saskatoon a capté cette photo numérique qui évoque le fameux roman de W. O. Mitchell « Who Has Seen The Wind. » Le roman traite du cycle de la vie. Le vent figure dans le texte où il est symbole de Dieu, de la nature, de l’adversité et de la mort. Le livre commence avec un poème de Christina Rossetti.
Who has seen the wind?
Neither you nor I:
But when the trees bow down their heads,
The wind is passing by.
Mark Vitaris, un photographe de Calgary, se sert d’appareils photo numériques tels que le Nikon D3 et Z6 sur lesquelles il installe des lentilles zoom de 14 à 24 mm et de 24 à 85 mm. L’homme de 68 ans explore les vastes plaines autour des frontières entre l’Alberta, la Saskatchewan, le Dakota du Nord et le Montana. Il présente son œuvre dans un livre intitulé « Borderlands. » En 2021, le livre lui a valu le prix du meilleur livre régional de l’année. Pour en savoir plus, visitez www.theborderlandsproject.com.
Le photographe Mark Vitaris a consacré cinq ans de sa vie à l’exploration des villages fantômes et des maisons abandonnées qui longent le 49e parallèle. Il partage ses découvertes sur https://www.instagram.com/buffalohunting/.
Le francophone Jonathan Smith de Lethbridge est un grand amateur de photographie. Il s’y intéresse depuis l’âge de 10 et sa collection comprend 20 caméras. Le jeune photographe de 20 ans qui étudie la génie à Lethbridge College a pris cette image sur film cet été. Vous trouverez son œuvre sur le site https://www.instagram.com/jonathanmsmithphoto/.
Tout comme la photo précédente, Jonathan Smith s’est servi d’un Graflex Crown Graphic 4 X 5 doté d’un objectif Graphex Optar de 135 mm f/4.7 et d’une pellicule Ektachrome E100 de Kodak. Il a développé lui-même ses photos avec du CineStill Dynamic Chrome afin d’augmenter la plage dynamique.
Avez-vous des photos que vous aimeriez partager avec nous? Prière de me les envoyer et d’y inclure une courte description. Le thème pour la chronique du mois de janvier est l’hiver. Envoyez-les à dliboiron4@hotmail.com.
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Un des projets d’écriture et de photographie dont Dominique se sent le plus fier est son site web www.canoetoneworleans.com. Ce projet est le fruit d’un voyage en canot de 5 000 km qu’il a complété en 8 mois entre la Saskatchewan et la Louisiane. Il a complété le voyage afin de transporter les cendres de son oncle à la Nouvelle-Orléans suite à sa mort soudaine.