Pour l’occasion, le Comité FrancoQueer de l’Ouest CFQO s’est notamment entretenu avec Zoé Bouchard, une personne transgenre non-binaire de la région d’Edmonton. Pour iel, cette journée est avant tout une belle opportunité de représentation. « Quand j’étais plus jeune, on ne voyait pas ça des journées comme ça. Je n’avais aucune idée qu’il y avait d’autres gens comme moi », a-t-iel fait savoir.
Zoé ajoute que ces journées sont essentielles pour réaliser qu’il existe d’autres personnes trans, et même des francophones trans en Alberta! « Ça aide les plus jeunes à réaliser qu’il y d’autres manières d’être. » Iel estime également avoir de la chance. « Je suis confortable dans ma vie et j’ai des gens qui m’aiment, qui m’entourent et qui m’offrent du support. »
Maxime Beauregard, une autre personne trans non-binaire de la région de Calgary, abonde dans le même sens. « Cette journée est avant tout une question de représentation, pour faire en sorte que les personnes transgenres peuvent trouver leur communauté et même trouver des modèles, pour voir qu’on existe et qu’il est possible d’avoir une belle vie. On peut réussir tout en étant trans. »
Cela dit, l’arrivée des personnes trans dans la sphère publique requiert des changements institutionnels importants. Dans cet esprit, Zoé estime qu’au-delà des salles de bains universelles et de la possibilité d’auto-identifier son genre sur les documents officiels, il reste beaucoup de travail à faire en termes de sensibilisation au sujet des enjeux trans auprès de la population générale. « Je ne peux parler que pour moi-même, mais personnellement, je ne vois pas de discrimination, mais plutôt de l’ignorance. Une partie du travail à faire, c’est de l’éducation populaire pour expliquer aux personnes cisgenres qu’elles ne sont pas seules dans l’univers. » Iel explique avoir toujours en tête des moyens d’éduquer ses collègues à sa réalité. « Il y a déjà de bonnes avancées réalisées par mon employeur auprès de son personnel. Entre autres, les employé.es sont fortement conseillés d’inclure leurs pronoms à leur signature de courriel. » Zoé ajoute qu’il s’agit d’un moyen assez efficace et facile pour les personnes de signaler leur compréhension des enjeux trans.
Même son de cloche du côté de Maxime Beauregard, qui propose une image pour décrire les changements à venir. « Le changement, ça prend du temps. C’est comme un gros paquebot qui tourne, il faut garder le cap. Avec l’intention, le changement arrivera. » Celui qui a reçu une bourse du Conseil des arts du Canada pour mettre sur pied une chorégraphie qui témoigne de sa transition estime que les institutions ne devraient pas craindre le changement. « C’est comme un oignon dont on enlève les pelures, une à une. Les toilettes universelles sont une couche, les signatures inclusives, une autre. Et ainsi de suite. »
Comme toute personne francophone qui se respecte, Zoé et Maxime admettent qu’il n’est pas facile d’être non-binaire dans la langue de Molière. « C’est une langue très stricte au niveau des règles. Même si j’utilise le pronom « iel », il reste à l’accorder dans une phrase, ce qui complique les choses. Le recours à la forme they/them est souvent plus pratique », fait savoir Zoé.
« Si les gens ne précisent pas le genre dans lequel iels souhaitent que l’on accorde leur pronom, il ne faut pas hésiter à demander », insiste Maxime, qui utilise principalement le pronom Y (au lieu de iel) et les accords masculins. Y’est d’accord pour dire que la langue française comporte son lot de complications lorsque vient le temps d’écrire ou de parler de façon inclusive. « Malgré tout, et malgré que l’on soit d’accord ou non avec les changements à venir, je recommande aux gens de voir l’humain derrière les enjeux trans. On a tous des expériences qui s’interconnectent, on a tous un cœur et des sentiments. Il faut garder cela en tête », termine-t-iel.