
D’office depuis mon arrivée au Yukon, j’ai exclu certains sentiers pour le printemps… J’ai en effet vite réalisé que les pentes raides et la neige tardive rendaient les randonnées bien difficiles et qu’il valait mieux attendre la fin juin pour profiter pleinement de l’effort et des paysages.
Tardivement cependant, à coups de messages du Service de protection de la faune du gouvernement du Yukon ou de gouvernements de Premières Nations, dont celui de la Première Nation Carcross/Tagish, j’ai ajouté des chemins à ma liste noire de mes sorties printanières.
Je n’en avais pas conscience, mais d’avril à mi-juin, c’est la saison de l’agnelage (mouflons de Dall) ou de la mise bas (chèvres des montagnes). Les nouveau-nés et leurs mères sont alors vulnérables à toutes perturbations de leur milieu, que ce soit par des prédateurs terrestres ou aériens.
En tant que randonneurs et randonneuses, nous entrons dans la première catégorie, celle des prédateurs terrestres! Il est donc préférable d’éviter toute montagne présentant un « terrain de fuite » (falaises abruptes où les mammifères peuvent fuir leurs prédateurs).
Si certaines des zones de naissances sont signalées par des panneaux conseillant de les éviter, ce n’est pas le cas de la plupart d’entre elles. Ainsi, les monts Needle, Caribou, Montana, Nares et White, ou le mont Sheep, dans le Parc national et réserve de parc national Kluane, sont à éviter jusqu’au 15 juin.
Une règle générale que j’applique, quelle que soit la faune de la zone sur laquelle je me trouve: reste à distance et laisse de l’espace; si le comportement de la faune change, c’est que je suis trop près!
Au printemps, je favorise des pentes orientées vers le sud où la fonte des neiges y est précoce. Une chance pour moi, plusieurs sentiers yukonnais répondent à ce critère. Je vous présente ici une sélection de mes cinq préférés.
Situé à une cinquantaine de kilomètres de Whitehorse, le sentier menant au canyon Spirit offre des panoramas magnifiques sur la vallée de la rivière Takhini, la vallée de l’Ibex et la chaîne de montagnes Sifton.
Après deux kilomètres sur une pente douce, j’atteins le canyon Spirit, avec de spectaculaires parois rocheuses. C’est une randonnée idéale pour dépoussiérer les chaussures de marche.
J’adore particulièrement venir ici au printemps, à la recherche de crocus, les premières fleurs colorées qui jonchent le sol après des mois de paysages en noir et blanc.
Carmacks est une communauté yukonnaise située à 180 km au nord de Whitehorse. Voilà maintenant deux ans que j’ai ajouté cette destination pour des randonnées printanières. De petites distances, des côtes pas trop raides et de jolies vues font de cet endroit un arrêt incontournable pour se remettre en forme.
Je compte une grosse heure pour Miller Ridge, une randonnée menant au pied d’une crête rocheuse avec des vues sur des affleurements rocheux et les larges vallées du plateau yukonnais.
Et puisque j’ai fait presque deux heures de route pour arriver à Carmacks, j’en profite pour découvrir d’autres balades dans le coin.
Directement accessible depuis le centre-ville de Whitehorse, cette boucle d’environ quinze kilomètres permet de longer les rives est et ouest du lac Schwatka, de la passerelle Rotary jusqu’au pont surplombant le canyon Miles. Idéals pour travailler son endurance, les hauts et bas du sentier cumulent quand même plus de 300 mètres de dénivelé positifs cumulés.
Il existe de nombreuses variantes quand je souhaite prolonger ma sortie, notamment vers Canyon City, la ville historique de la ruée vers l’or du Klondike, et même au-delà en rejoignant le sentier Yukon River Upstream.
La première fois que j’ai fait cette randonnée, je me suis fait surprendre par la côte abrupte que j’ai dû gravir. Je m’étais fait avoir par le faible kilométrage (2 pour l’aller-retour) sans réaliser le pourcentage de la pente! Depuis, c’est devenu mon endroit favori pour entraîner mon cœur et mes jambes: je monte, je descends, et je recommence, une fois, deux fois ou même trois fois.
Une fois arrivé sur le plateau, le panorama sur le lac Marsh, la rivière M’Clintock et le fleuve Yukon est à couper le souffle.
J’ai déjà essayé de me rendre plus loin que ce beau point de vue, mais le sentier n’est plus défini et je me suis retrouvée à utiliser mes mains plusieurs fois pour gravir quelques parois rocheuses. La vue n’étant pas meilleure plus haut selon moi, je ne reprendrais pas le risque de m’aventurer plus loin.
À une soixantaine de kilomètres de Whitehorse, cette randonnée me permet de vérifier si mon corps est enfin prêt pour l’été! Avec ses 17 kilomètres et ses près de 900 m de dénivelé positif, le sentier suit d’abord une route de quad au-dessus de l’escarpement où coule le ruisseau Stone; puis s’aventure en zone alpine où il n’y a aucune trace de passage humain.
Avant de quitter le sentier, je vérifie bien où est le chemin retour pour le retrouver facilement, car une déviation dans les arbustes est vite arrivée, rendant la randonnée beaucoup moins plaisante!
Petit conseil pour éviter l’érosion de la zone alpine: si vous randonnez en groupe, il est conseillé de se disperser afin de ne pas endommager le lichen fragile.
Une autre alternative pour randonner au printemps est de se rendre en Alaska où la présence de l’océan apporte un climat plus doux et une fonte des neiges précoce. À deux heures de route de Whitehorse, de belles randonnées sont possibles à Skagway. Plus loin (quatre heures et demie de voiture), Haines peut aussi vous séduire, notamment avec des marches le long de la côte.